Au début du mois de février, Le Soleil révélait que, selon la revue Forbes, le CHU de Québec se classait parmi les 300 meilleurs employeurs du Canada. « Nous sommes les premiers surpris de l’apprendre », a réagi Chantal Cauchon, présidente du Syndicat des travailleuses et des travailleurs du CHU de Québec – CSN.

Par Nicolas Lefebvre Legault, conseiller à l’information

« Le CHU n’est certainement pas un enfer, mais de là à dire qu’il s’agit de l’un des meilleurs employeurs au pays, il y a une marge », précise Chantal Cauchon, « on peut se questionner sur la méthodologie du sondage, voir à qui la revue a posé ces questions ». En effet, comme dans le reste du réseau de la santé et des services sociaux, le travail au CHU est reconnu difficile. « D’ailleurs, l’employeur peine à recruter, malgré des conditions de travail avantageuses sur papier », rappelle la syndicaliste.

« Si le CHU de Québec est parmi les meilleurs employeurs du Canada, ça pose de sérieuses questions sur les autres ! », s’exclame Chantal Cauchon. « La direction va surement se féliciter de ce classement, mais quant à nous, c’est de la poudre aux yeux », lance la syndicaliste qui confie avoir deux ou trois idées à soumettre si, d’aventure, la direction voulait réellement améliorer les conditions de travail de ses employé-es.

Identifier les problèmes

« Il y a beaucoup de choses dans la convention collective qui nous ont fait perdre des membres dans les dernières années », explique la présidente du syndicat de plus de 2 700 membres de la catégorie 2. Chantal Cauchon donne en exemple la nouvelle clause de disponibilité minimale de 7 jours sur 14 sur deux quarts. « Ça nous a fait mal », raconte-t-elle, « avant c’était moins restrictif et il y avait plein de gens qui avaient un deuxième emploi, des retraité-es ou encore des chefs de famille monoparentale parmi nos membres, ces gens-là sont partis depuis. »

Il y a pénurie de personnel au CHU de Québec comme dans le reste du réseau de la santé. « Les préposé-es aux bénéficiaires et les assistantes et assistants techniques seniors en pharmacie sont pris avec le TSO (temps supplémentaire obligatoire) et les autres titres d’emploi avec des heures supplémentaires », révèle la syndicaliste. À titre d’exemple, en hygiène-salubrité à l’Enfant-Jésus, il y eu 9 000 heures, en heures supplémentaires l’an dernier. Selon le syndicat, c’est l’équivalent de 22 quarts de travail. « Et là, on parle juste d’un département dans un hôpital sur cinq, c’est beaucoup », s’exclame la militante, qui peste du même souffle contre les audits à répétition pour le personnel de l’hygiène et salubrité. « On ne peut pas demander aux employé-es de couvrir deux ou trois départements en même temps et de l’autre venir les auditer sur la qualité de leur travail », dit-elle.

La direction tente d’embaucher du personnel, mais à un sévère problème de rétention. « L’an dernier, il y a eu 422 embauches dans notre catégorie, mais durant le même temps il y a 398 départs, pour l’attraction on repassera », révèle Chantal Cauchon qui précise que les secteurs aux besoins les plus criants sont l’hygiène-salubrité, les services alimentaires, chez les préposé-es aux bénéficiaires, les assistantes et assistants techniques seniors en pharmacie et les préposé-es à la stérilisation.

Trouver des solutions

Le syndicat mise beaucoup sur la renégociation de la convention collective locale pour apporter des améliorations et trouver des solutions aux problèmes vécus par les membres. « À force de pression et de dénonciations, l’employeur a commencé à bouger sur certains points », se réjouit Chantal Cauchon, « on a des projets pilotes en cours dans certains secteurs comme en pharmacie où l’on créé de nouveaux titres d’emploi, où on donne des garanties d’heures, où on offre des postes à des occasionnels pour pallier au manque de personnel. »

« En ce moment, on travaille sur le cas du manque de préposé-es aux bénéficiaires », poursuit Chantal Cauchon, « il y a plein de choses à analyser dans ce dossier. » Selon le syndicat, 52 postes de préposé-es aux bénéficiaires au CHU de Québec sont actuellement en « fin de liste » (c’est-à-dire que personne à l’interne ne veut ou ne peut les prendre). « Nous, ce qu’on demande à l’employeur, c’est qu’il vérifie avec les employé-es à temps partiel pourquoi ils ne les prennent pas ces postes-là? Il faut leur demander ce qui cloche, il y a un problème là », pense la syndicaliste qui rajoute que le CHU de Québec ne s’aide peut-être pas pour le recrutement en externe en ayant de très hautes exigences tout en maintenant une demande de disponibilité minimale rigide. « Tout doit être analysé pour voir ce qui peut être fait », martèle la syndicaliste.

Pour la suite des choses, le syndicat mise sur la négociation locale pour régler les problèmes pour les titres d’emploi les plus en demande. L’objectif syndical demeure d’éliminer les heures supplémentaires, les heures supplémentaires obligatoires et les refus de congé. « On ne veut plus être en sous-effectif, c’est la clef », conclut Chantal Cauchon.


Extrait du numéro de mai 2018 du journal Le Réflexe