Démystifier les questions d’immigration
Citoyenne ou citoyen, résidente ou résident permanent, résidente ou résident temporaire, l’avocat Guillaume Cliche-Rivard nous a présenté les complexités du système actuel d’immigration pour le démystifier.
Saviez-vous que dans les cas des permis de travail fermés qui sont reliés à des emplois précis, on pourvoit des postes qui ont été affichés pendant plusieurs mois ? « Certains disent que les immigrants volent des jobs, mais je vous affirme que non, ils ne les volent à personne ces jobs », a soutenu Me Cliche-Rivard. En effet, les compagnies qui voudraient faire appel à des travailleuses et travailleurs étrangers qualifiés doivent passer au travers d’un long processus qui requiert de prouver qu’ils n’ont pas pu pourvoir ces emplois avec des citoyennes et citoyens canadiens.
Il a terminé sa présentation d’un commentaire éditorial sur les politiques du gouvernement actuel. Sous le gouvernement Legault, ce ne sont qu’environ 10 % des dossiers qui sont acceptés. Selon lui, nous devrions nous doter d’un processus indépendant des volontés politiques du gouvernement, notamment par l’entremise de la vérificatrice générale, qui permettrait d’établir les seuils d’immigration selon des données probantes et les besoins.
En terminant, notre conférencier a souligné que les 18 000 dossiers jetés à la poubelle et remboursés aux demandeurs coûteront très cher à la société québécoise, autant économiquement que socialement. Si pour le demandeur en question il en coûte près de 800 $, ce montant est doublé voir triplé en frais d’administration des dossiers, des montants qui ont déjà été investis par le ministère.
Guide de référence
En après-midi, les congressistes ont adopté une série de propositions sur l’immigration et la pénurie de main-d’œuvre pour outiller les syndicats sur ces enjeux. Le conseil central produira notamment un guide de référence sur l’intégration des personnes immigrantes dans les milieux de travail.
Boucar Diouf enflamme les congressistes
Une surprise attendait les congressistes jeudi matin : le très attachant Boucar Diouf est venu témoigner sur son expérience personnelle d’immigration. Le conférencier surprise a touché chacun d’entre nous en combinant anecdotes et blagues sur ses péripéties hivernales. Du parc de Miguasha jusqu’à Longueuil, il nous a démontré ce qu’il est possible d’accomplir lorsque la volonté d’intégration est présente, et surtout l’ouverture vers les autres de notre côté.
Panel sur la réforme des lois en santé et sécurité au travail
Consensus sur l’abolition du BEM
Un consensus semble se dessiner sur l’abolition du Bureau d’évaluation médicale (BEM), du moins, si on en croit les participants au panel sur la réforme des lois en santé et sécurité au travail de jeudi après-midi.
Ann Gingras, la présidente du conseil central, a lancé le débat entre les panélistes en posant une question simple mais lourde de sens : « si vous étiez ministre du travail, quelles seraient vos priorités pour améliorer les lois en santé et sécurité du travail? »
Marc Laviolette, ancien membre du conseil d’administration de la CSST de 1994 à 2002 et ancien président de la CSN de 1999 à 2002, s’est lancé dans une envolée où il a tracé à grands traits une réforme en sept points qu’il a nommé « traiter la personne et non la réclamation. »
Pour Marc Laviolette, l’idée que la facture basée sur l’expérience mène à de la prévention est fausse. « C’est un appel à la contestation, c’est le cancer du système actuel », dit-il. Pour lui, il faut donc d’abord revoir la question du financement. Deuxièmement, il faut abolir le bureau d’évaluation médicale. « Dans la vraie vie, personne ne conteste jamais le jugement du médecin traitant, sauf à la CNESST », indique-t-il. Selon lui, le tiers des accidents de travail sont contestés. Ensuite, les maladies imputables aux tracasseries administratives ou à la longueur du processus de gestion lui-même ne sont pas compensées.
De plus, il a rajouté que les travailleurs autonomes doivent être assujettis à la loi, qu’on devrait avoir les mêmes conditions que dans le code criminel pour la vidéofilature, et également que la révision administrative devrait être abolie. Finalement, le Tribunal administratif du travail (TAT) devrait être placé sous la juridiction du ministère de la Justice, les commissaires devraient avoir le même statut qu’un juge. Alain Tremblay, juge à la retraite du Tribunal administratif du travail en matière de santé et sécurité du travail (de 1998 à 2018), y est allé ensuite de six « recommandations au ministre ». Première recommandation: revoir tous les cinq ans la liste des maladies professionnelles et confier cette tâche à un organisme indépendant avec obligation au ministre de répondre dans les six mois. Pour Alain Tremblay, la recherche de consensus entre les parties ne fonctionne pas, la liste n’a pas été changée depuis 1985. Deuxièmement, il faut revoir le mécanisme de révision et d’appel pour redonner le pouvoir à la CNESST de régler les problèmes de façon simple et rapide (en s’inspirant de l’Ontario). Pour le juge à la retraite, le Bureau d’évaluation médicale, c’est le principe du double procès. Selon lui, il faudrait l’abolir. Si l’employeur veut contester, on devrait, selon lui, donner le choix au travailleur d’aller chercher un expert dans une liste fournie par la CNESST. Pour éviter la contestation à répétition des « emplois convenables », il faudrait mettre la présomption de l’article 52 à 55 ans pour tout le monde (au lieu de 60 ans pour les accidents). Ensuite, il faudrait faire le ménage de la jurisprudence. On sauverait des contestations et du temps selon lui. Finalement, il faudrait créer des Bureaux de révision pour accompagner les travailleurs non-syndiqués et les petits employeurs.
Bernard Cliche, un avocat de pratique privée depuis 1975 qui représente surtout la partie patronale en santé et sécurité du travail, y est allé lui aussi de ses recommandations. Bernard Cliche trouve que la CNESST s’est beaucoup bureaucratisée, il croit qu’il faudrait revoir le règlement de régie interne pour que les parties concernées soient plus impliquées. Les délais sont un des grands problèmes actuels du système. Bernard Cliche croit aussi que le BEM, dont 4 à 5 médecins accaparent 70 % des dossiers, pourrait disparaître. Toutefois, il faudrait trouver une manière de maintenir un équilibre entre travailleurs et employeurs. L’avocat croit aussi qu’il faudrait abolir les révisions administratives, selon lui, on en vient à la même conclusion dans 94 % des cas. En ce qui concerne les maladies professionnelles, il faudrait un comité scientifique indépendant et paritaire pour revoir périodiquement la liste et que les parties s’entendent (sinon le ministre tranchera). Finalement, lui aussi croit que le TAT devrait avoir les mêmes garanties d’indépendance que les autres tribunaux et que les commissaires devraient avoir un statut comme les juges.
Le dernier intervenant, mais non le moindre, fut Roch Lafrance, permanent de l’Union des travailleuses et travailleurs accidentés et malades depuis 1999. Roch Lafrance trouve intéressant le consensus qui semble se dégager sur l’abolition du BEM. Il appelle toutefois à faire preuve de créativité et à s’inspirer de la France en abolissant le droit de contestation des employeurs sur les réparations, mais en leur donnant le droit de contester leur facture. Roch Lafrance n’est pas à l’aise avec l’abolition pure et simple des révisions administratives, c’est un droit important pour les personnes non-syndiquées. Il propose le retour au Bureaux de révision. Selon lui, il faudrait aussi abolir la stipulation que dans les cas de réadaptation, la CNESST paie pour la solution la plus économique. Le système actuel ne fonctionnant pas, il faut que la CNESST paie aussi pour de la formation pour les accidentés du travail.
En conclusion, les différents intervenants ont rappelé le caractère politique de toute réforme de la loi. À ce sujet, Marc Laviolette a fait un rappel intéressant : « qui est blessé au travail? Ce sont les travailleuses et les travailleurs. Dans le film, le mouvement social précède la réforme. Pourquoi il y a eu une réforme à l’origine? À cause des mouvements de grève sur des enjeux de santé et sécurité au travail. » Marc Laviolette y est ensuite allé d’un aveu : « le mouvement syndical s’est assis sur ses lauriers et s’est bureaucratisé sur les questions de santé et sécurité au travail. » Selon le vétéran, « des mouvements sur la santé-sécurité au travail, il n’y en a plus vraiment ».
État de fait que le conseil central entend bien changer. Tous les intervenants se sont entendus pour reconnaître que la prochaine réforme sera historique et le mouvement syndical doit s’organiser en conséquence afin de passer en mode mobilisation. Les congressistes se sont en effet ensuite penchés sur une série de propositions reprenant les revendications du mouvement syndical en vue d’intervenir rapidement dans le débat qui se dessine avec la réforme annoncée par le ministre du Travail Jean Boulet.
Le nouveau comité exécutif
Le congrès est l’occasion de renouveler l’équipe du conseil central, notamment les membres de son comité exécutif qui ont toutes et tous été déclarés élus jeudi. Ann Gingras, qui se représentait pour un nouveau mandat, a été réélue à la présidence tout comme Gilles Lamontagne à la première vice-présidence. Barbara Poirier et Louis Hamel, qui siégeaient par intérim au comité exécutif, ont été respectivement élus deuxième vice-présidente et trésorier. Finalement, François Proulx-Duperré a été élu secrétaire général.
Élections au conseil syndical
À noter, huit représentantes et représentants à la vie régionale ont également été déclarés élus. Il y aura des élections vendredi pour pourvoir les six postes de représentantes et représentants à la vie régionale pour la région métropolitaine de Québec au conseil syndical.
Par ailleurs, les trois postes au comité de surveillance ont été pourvus.
Le Réflexe au quotidien
Le Réflexe au quotidien est publié tous les jours pendant le congrès du Conseil central de Québec–Chaudière-Appalaches (CSN).
Secrétariat du congrès : Salle 305 – À côté de la salle de plénière
Courriel : ccqca@csn.qc.ca
Rédaction: Camille Godbout et Nicolas Lefebvre Legault
Conception et réalisation: Nicolas Lefebvre Legault
Édition et correction: Bérengère Lottin
Crédit photos : Clément Allard