Valse-hésitation sur les négociations du secteur public

La crise de la Covid-19 s’est déclenchée en pleine période de négociation du secteur public, les conventions collectives arrivant à échéance le 31 mars 2020. Si, dans un premier temps, le Conseil du trésor a proposé de les suspendre, il a par la suite tenté d’imposer une négociation accélérée avant de finalement se raviser. Pour résumer la situation actuelle : le Conseil du trésor voudrait négocier, mais les syndicats ne veulent pas. Retour sur une situation kafkaïenne.

Par Nicolas Lefebvre Legault, conseiller à l’information


Je t’aime, moi non plus

Le 13 mars, en faisant le lien avec la crise de la Covid qui débute, le Conseil du trésor demande aux organisations syndicales de suspendre les négociations ; ce qu’elles acceptent toutes sans se faire prier, les efforts devant être déployés pour contrer la pandémie.

Le 15 mars, coup de théâtre ! Lors d’une rencontre avec le premier ministre, le gouvernement soumet une hypothèse de règlement pour trois ans et pour le seul secteur de la santé et des services sociaux. La CSN répond qu’elle n’a pas de mandat de régler, encore moins pour un seul secteur.

Face aux demandes gouvernementales, les fédérations du secteur public de la CSN élaborent une position commune : pause de la négociation pour au moins 18 mois assortie de mesures d’urgence et de compensations, notamment de primes, pour les employé-es du secteur public au front dans la lutte contre la Covid-19.

Loin d’accepter la proposition de la CSN, le Conseil du trésor tergiverse tout le mois de mars et menace même de lier les mesures d’urgence et les primes Covid au renouvellement des conventions collectives aux conditions du dépôt patronal du mois de décembre 2019 (alors jugé nettement insuffisant par toutes les organisations syndicales).

Le gouvernement choisi finalement de procéder par arrêté ministériel, le 4 avril, et annonce des primes d’exposition au risque de 8 % limitées à certains lieux de travail ou unités de soins et une prime de reconnaissance de 4 % pour les autres travailleuses et travailleurs de la santé et des services sociaux. 

Cette prime étant jugée bien trop maigre et inéquitable, puisqu’elle n’est pas versée à bon nombre de travailleuses et de travailleurs au front, notamment le personnel des services de garde d’urgence, la CSN poursuit ses représentations en vue d’obtenir une prime de 3 à 4 $ l’heure pour toutes et tous, pour le temps de la crise sanitaire.

Pour ce qui est de la négociation du secteur public, on peut considérer qu’elle est pratiquement sur pause pour le moment. 

La CSN est d’avis qu’il est important de ne pas négocier les conventions collectives du secteur public sur un coin de table et dans la précipitation. La situation actuelle ne doit pas, en aucun cas, servir à camoufler les problèmes vécus dans les réseaux ; ces problèmes étaient bien réels avant la crise et ils le seront plus encore après. S’il y a une chose que la crise nous a démontrée, c’est bien l’importance capitale des travailleuses, il s’agit d’une majorité de femmes, des services publics. Il serait temps de reconnaître leur contribution à sa juste valeur.


Extrait du numéro de mai 2020 du journal Le Réflexe.