Programme du centenaire

« Ce ne sera pas la CSN qui parle à la CSN » – Jean Lortie

Pour son centième anniversaire, la CSN veut rendre hommage à la classe des travailleuses et des travailleurs. « On a choisi de ne pas faire une histoire institutionnelle, » explique Jean Lortie, le secrétaire général de la CSN, « mais de rendre hommage à la classe ouvrière, à la classe des travailleuses et des travailleurs; tout le centième est dédié à ça. »

Jean Lortie, lors du congrès de juin 2019 du conseil central.

« La CSN est la seule organisation syndicale au Canada à avoir 100 ans d’histoire sans discontinuité, sans rupture ni fusion, » rappelle Jean Lortie. « Plusieurs de nos syndicats existent même depuis plus longtemps encore, dont le plus ancien de tous qui est basé à Québec : le Syndicat du transport public du Québec métropolitain qui représente les chauffeurs du RTC. » 

Le secrétaire général souligne que cette histoire syndicale est basée sur la militance, bénévole, de milliers de militantes et de militants qui ont bâti l’organisation depuis 100 ans. « Ce n’est pas comme le centenaire d’une institution financière ou d’un parti politique, » poursuit-il, « c’est assez exceptionnel ce que l’on vit. »

Un livre et un film

C’est en gardant en mémoire cette énergie militante qui propulse la CSN depuis 100 ans que le centenaire a été réfléchi. « Toutes les activités sont dédiée à l’évolution du travail, de la condition ouvrière, depuis 100 ans, » révèle Jean Lortie, « on a tendance à oublier notre passé, d’où l’on vient; c’est l’occasion de prendre conscience de l’évolution des conditions de travail et des gains faits au fil de notre histoire. »

Un film et un livre réalisés par des équipes indépendantes de la CSN sont notamment au programme. « Yvon Deschamps nous a donné les droits sur le titre de son monologue ‘’les unions cossa donne’’ pour le film », dit Jean Lortie, « c’est un documentaire construit autour d’entrevues avec des chercheurs, des professeurs et d’anciens dirigeants de la CSN. » Le film, qui est terminé, sortira dès que la centrale parviendra à une entente avec un réseau pour sa distribution. « Le livre, dont le titre n’est pas encore décidé, va être très graphique, avec beaucoup d’images et de photos choc pour documenter l’évolution du travail depuis 100 ans, » ajoute-t-il.

Une exposition décentralisée cet été
L’impression des panneaux des expositions itinérantes est commencée.  Photo  tirée de la page Facebook « Centenaire de la CSN »

Chronologiquement, l’existence de bien des conseils centraux précède la fondation de la CSN. « Le centenaire c’est aussi l’occasion de faire un hommage aux régions : ce sont les régions qui ont fait la CSN, » relate le secrétaire général. Le centenaire se déploiera donc en treize expositions régionales thématiques dès le mois de juin.

« On commence avec Québec où l’exposition sera sur le thème de l’évolution du transport public depuis un siècle, » révèle Jean Lortie. Chaque exposition régionale — on parle d’installations, avec des panneaux, des photos et des tableaux — abordera un thème différent, toujours en lien avec l’évolution des conditions de travail. « Ça va se déployer sur tout l’été 2021, il y aura une activité par région, » explique-t-il.

Le centenaire de la CSN va aussi s’installer de façon permanente dans l’espace public, notamment à Montréal où le parc adjacent au siège social de la confédération sera renommé « espace du centenaire de la CSN ». Une œuvre d’art public en hommage au « faubourg à mélasse » y sera inaugurée. Une plaque de bronze sera également installée, à Gatineau, devant l’édifice où a été fondée la centrale. Les célébrations du centenaire se poursuivront jusqu’au 1er mai 2022 où le nouveau siège social de la CSN et l’œuvre d’art adjacente seront finalement inaugurés.


Un centenaire qui dérange?

Le peu d’intérêt manifesté en dehors de nos rangs pour le centenaire de la CSN n’étonne pas outre mesure le secrétaire général de la CSN. « L’intérêt pour l’histoire sociale a beaucoup diminué, on n’est plus là, il n’y a pas d’intérêt pour l’histoire des travailleuses et des travailleurs, » explique Jean Lortie.

Des réseaux de télévisions ont même refusé de diffuser le documentaire produit pour l’occasion en invoquant un conflit d’intérêt, la CSN a financé la production, ou un manque d’objectivité. « C’est sûr que ça dérange ce qu’on a choisi de faire, » postule le secrétaire général, « le film, le livre, les expositions visent à conscientiser à la condition des travailleuses et des travailleurs d’hier et d’aujourd’hui. On a honte de ça, de l’exploitation et de la misère qu’on a vécues ici dans un passé pas si lointain. Et puis, tout n’est pas réglé, de la misère et de l’exploitation, il y en a encore. Beaucoup de gens n’ont pas voulu participer à cause de ça. » 

Pourtant, c’est toute la société qui est interpellée par l’histoire de la condition ouvrière. « Rendre hommage à la CSN, ce n’est pas rendre hommage à l’institution, c’est rendre hommage aux travailleuses et aux travailleurs, à toute la classe ouvrière, » croit Jean Lortie. « Nous ce qu’on voulait c’est qu’un travailleur de 25 ans qui regarde le film ou lit le livre comprenne qu’il n’y a rien d’acquis, qu’il a fallu et qu’il va falloir se battre. Au travers de la CSN, on rend hommage à la société québécoise qui a évolué grâce aux luttes ouvrières depuis 100 ans. »


Extrait du numéro de mai 2021 du journal Le Réflexe