C’est réglé
Les paramédics de nos régions satisfaits des gains obtenus
L’entente de principe intervenue le 7 mai dernier, après 11 mois de grève légale, a été largement plébiscitée par les paramédics de Québec–Chaudière-Appalaches. Si les résultats sont mitigés dans le reste de la province, avec un taux d’acceptation global de 64 %, les majorités sont très élevées ici. Il faut dire que les syndicats de la région font des gains sur toutes leurs priorités : salaire, charge de travail et horaires de faction.
Reconnaissance
L’une des principales préoccupations des paramédics concernait la reconnaissance de leur profession et les salaires qui viennent avec. L’un des slogans de la négociation était d’ailleurs « le salaire le plus bas de l’urgence. » Les avancées sur ce point sont importantes. « On passe au rangement 19, c’est une reconnaissance de la profession », explique Emmanuel Deschênes, secrétaire du Syndicat des paramédics de Charlevoix (CSN), « on parle d’une augmentation de 4,08 $ de l’heure au sommet de l’échelle salariale. »
De plus, un comité sera mis sur pied sur l’évaluation du métier pour évaluer correctement la tâche et le rangement salarial correspondant. « On a obtenu le ¾ de ce que l’on voulait », explique Frédéric Maheux, président de l’Association des travailleurs du préhospitalier (CSN), « ils nous ont donné le même rangement que les inhalothérapeutes, mais nous ont voulait celui des infirmières… nos vis-à-vis ne sont pas fermés à ça, mais demandent à être convaincus, d’où la création d’un comité pour faire un travail sérieux d’évaluation de la tâche, c’est un grand bond en avant. »
Évolution du métier
Avec les années, le métier de paramédic s’est complexifié et professionnalisé. La négociation aura permis de faire des changements à la convention collective permettant d’en tenir compte et d’ouvrir les textes pour tenir compte de l’évolution. « On change les textes de l’appellation d’emploi pour passer de ‘’transporter les patients à l’hôpital’’ à ‘’évaluer les patients et les transporter au besoin’’ », explique Frédéric Maheux, « on a ouvert les textes pour permettre au ministère de faire des projets et des études pour changer la tâche, désencombrer le système et donner des soins plus efficaces aux patients. »
Pour Emmanuel Deschênes, cela permettra d’améliorer la qualité des soins. « On ne sera plus obligé d’amener systématiquement les patients à l’urgence, on pourra par exemple aller dans un GMF si c’est plus pertinent », explique-t-il, « ça va être moins encarcané et on va pouvoir nous impliquer plus dans le système de santé. »
Charge de travail
La charge de travail, plus précisément la surcharge, était l’une des préoccupations majeures des paramédics en milieu urbain. « On a obtenu la création de comités sur la charge de travail pour trouver des solutions par région », explique Frédéric Maheux, « ça va nous permettre d’implanter à Québec des projets pilotes qui ont fonctionné ailleurs, mais pour lesquels il n’y avait pas d’ouverture jusqu’à maintenant, on va pouvoir avancer et diminuer la charge de travail des paramédics. »
Horaire de faction
En région, la préoccupation majeure portait plutôt sur la conversion des horaires de faction, où les paramédics doivent demeurer disponibles 24 h sur 24 h pendant 7 jours, en horaire à l’heure. Des gains majeurs ont été faits à ce chapitre dans Charlevoix, mais aussi Montmagny où l’horaire de faction a été converti. Malheureusement, ce n’est pas le cas dans toutes les régions ce qui explique les résultats mitigés au niveau national.
« Dans Charlevoix, on a réussi à convertir 70 % des horaires de faction en horaire à l’heure », explique Emmanuel Deschênes, « le temps de réponse est bien meilleur avec un horaire à l’heure, on gagne 15 minutes sur les interventions. Dorénavant, le noyau dur de la population de la région aura maintenant un service 24 h sur 24 h. » Concrètement, ce sont trois horaires de faction qui sont convertis dans Charlevoix, ce qui entraîne la création de 6 emplois de qualité.
« On est partis de 8 horaires de faction en 2018 à 2 aujourd’hui », raconte Emmanuel Deschênes, « il reste Saint-Siméon et L’Isle-aux-Coudres avec des horaires de faction. » Le syndicaliste se donne un horizon de 3 à 5 ans pour pouvoir les convertir eux aussi en horaire à l’heure.
« Ce qu’il est important de comprendre c’est que le gouvernement ne fait pas de cadeau », explique le secrétaire du syndicat de Charlevoix, « il faut travailler les dossiers… nous on l’a travaillé avec le 2e front, comme un dossier sociopolitique en mobilisant la communauté, si on ne fait pas ça, on ne gagne pas. » Emmanuel Deschênes confie s’être inspiré d’une conférence de Roger Valois, ancien vice-président de la CSN, pour développer sa stratégie. « Roger Valois disait que pour gagner il fallait non seulement dénoncer la situation, mais croire aux solutions proposées, si tu ne crois pas qu’il y a des solutions et que tu peux y arriver, c’est impossible d’obtenir des gains. »
Suite du monde
« La nouvelle convention collective va apporter beaucoup de choses et permettre d’avancer, mais il faut que ça signe », conclut Frédéric Maheux. Le travail sur les textes prend en effet plus de temps que prévu et les conventions n’ont pas toutes encore été signées. Du côté de la Fédération de la santé et des services sociaux, Jean Gagnon, le représentant du secteur se fait philosophe : « Bien sûr, nous aurions aimé tout régler maintenant, mais il faut garder en tête que nous nous retrouverons en négociation dans moins d’un an. Par notre mobilisation au cours des deux dernières années, nous avons forcé un virage dans la discussion. Le gouvernement parle désormais d’élargir le champ de notre profession et de revoir l’organisation des services. De notre côté, nous nous mettons au travail dès maintenant pour continuer de progresser et préparer la prochaine ronde de négociation. »
Extrait du numéro de septembre 2022 du journal Le Réflexe